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Le blog de benjamin borghésio
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26 octobre 2015

Tout est bon, pour justifier la haine et le mépris que quelques-uns de ces Français éprouvent envers la France.

Franz-Olivier-Giesbert… et en ce domaine, Giesbert (qui sévit toujours au Point) n'est pas manchot comme le prouve un de ses récents éditoriaux qui mélange contre-vérités et interprétations pour le moins abusives.

Jugeons par nous même :

C'est de Gaulle qui, contre l'évidence, imagina l'un des plus grands dénis du XXe siècle, mythe fondateur de l'après-guerre : après la débâcle de 1940 et la collaboration qui s'ensuivit, ce ne sont pas les Alliés anglo-saxons qui auraient libéré notre pays, non, mais les Français eux-mêmes : les nazis se seraient enfuis devant eux.

Vichy_10_juillet_1940Cette fable nous a permis de retrouver rapidement et à bon compte une certaine dignité sans avoir à tirer les leçons de la défaite.

Elle nous a permis aussi d'oublier que c'est la Chambre du Front populaire qui grâce notamment à une partie de la gauche socialiste, a donné les pleins pouvoirs au maréchal Pétain. Pardon pour ce rappel historique qui fâche encore.

memoire-guerreQuand de Gaulle contesta-t-il la part considérable prise par les alliés dans la libération de l'Occident? On chercherait en vain, dans ses Mémoires de Guerre, un quelconque chapitre qui attesterait du contraire, mais Giesbert pratique l'art du raccourci et de l'approximation, pour les besoins de sa "démonstration"

Il est indéniable que la France, pays de 38 millions d'habitants dont l'économie était encore à dominante agricole et dont la démographie ne s'était pas remise de la terrible saignée de 1914-1918, fut vaincue en 1940 par une Allemagne fortement industrialisée, peuplée de 80 millions d'habitants, d'autant plus que le pouvoir militaire sclérosé par la clique Pétain-Weygand-Gamelin n'avait pas accompagné les indispensables évolutions stratégiques nécessaires, qu'il y avait hiatus entre les politiques extérieure et de défense nationale. Faillite des élites certes ; certainement pas défaillance du peuple dont 92.000 de ses soldats furent massacrés en six semaines... sans doute sans s'être battus? .

Anglais Si les Anglais, après avoir complaisamment favorisé le redressement de l'Allemagne nazie (politique irresponsable de l'appeasement) dans l'entre deux guerre, avaient tenu leur rôle en 1939-1940 et concouru efficacement à l'effort commun il est probable qu'on n'aurait pas eu à libérer l'Europe occidentale, pour le simple motif qu'elle n'aurait pas été envahie (la BEF présente sur la frontière belge était tout au plus forte de 10 divisions qui se sont fort peu battues avant de se carapater à Dunkerque dès que ça sentit le roussi - ça, c'est une vérité historique!).

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 La fameuse "chambre du Front populaire qui donna les pleins pouvoirs à Pétain" (sous entendu : grâce aux socialistes, Giesbert en rajoute dans l'ignominie pour faire bonne mesure), parlons-en.

Les seuls députés authentiquement de gauche élus en 1936 furent les communistes et les socialistes et si en 1936 les radicaux – parti charnière sans lequel aucune majorité ne pouvait se constituer sous la IIIe République – ont soutenu le Front populaire, ce fut pour s'en dégager un an après et s'allier avec la droite – y compris avec des tendances les plus réactionnaires de cette dernière (les radicaux sont comme les radis, disait-on à l'époque et à juste titre: plus ils sont rouges à l'extérieur, plus ils sont blanc à l'intérieur). Si on ajoute à cela le fait que le Front populaire ne contrôla jamais le Sénat qui avait un vrai pouvoir de blocage, il est patent qu'en 1940, la responsabilité du pouvoir incombait à la droite alliée à ces radicaux qui – à de rares exceptions près – n'ont pas manqué l'opportunité de se déshonorer.

Les "pleins pouvoirs votés à Pétain", maintenant.

Premièrement, on fera litière de cette contrevérité historique. Les Parlementaires qui se réunirent à Vichy en juillet 1940 ont octroyé à Pétain des pouvoirs étendus lui permettant de gérer le pays jusqu'à conclusion d'une paix qu'il avait promis de négocier "dans l'honneur", et de proposer une nouvelle Constitution qui devait être ratifiée par les Assemblées. Or Pétain ne tint aucun de ces engagements, allant même jusqu'à déposer Albert Lebrun (le mal n'était pas bien grand tant le personnage était falot, mais le symbole était fort). Ainsi, sous entendre même de façon elliptique que "le Front populaire avait été l'instrument de la collaboration", c'est ni plus ni moins commettre une forfaiture.

de Lattre en 1940, au service de Pétain.Deuxièmement, il faut se souvenir de l'atmosphère dans laquelle les Parlementaires siégèrent à Vichy en ce jour funeste. Nazis présents à une heure de route de blindés, dont on agitait la menace en permanence ; division de Lattre dont il se disait aussi qu'elle était disponible pour constituer une garde prétorienne au service de Pétain et surtout, de Laval qui avait juré de "vomir cette Chambre qui l'avait rejetée" ; parlementaires éminemment républicains, fortes voix qui auraient pu entraîner leur collègues, contraints physiquement au silence (Blum), éloignés de force ou empêchés de revenir (affaire du Massilia, arrestation illégitime de Mandel, Mendès France, Jean Zay, etc.) Qui peut sérieusement soutenir qu'avec ces fortes voix en situation de pouvoir s'exprimer, le débat n'aurait pas pris une autre tournure ?

Antoine_PinayEt quoiqu'en dise Giesbert, si des parlementaires socialistes ont voté ces "pleins pouvoirs", ce furent bel et bien dans les rangs de ce parti que l'on compta, en proportion des présents, le plus de réfractaires à ce qui deviendrait l'Etat français. En outre, ceux qui furent dans l'erreur l'ont expié politiquement à la libération, rejetés par leur camp, alors que la droite fut d'une très grande magnanimité à l'égard de ses "traitres" (le bon petit père Pinay, par exemple, très vite relevé de son indignité nationale (il vota non pas résigné devant la situation, mais avec enthousiasme le blanc seing attribué à Pétain) et fut même "recyclé" au gouvernement par de Gaulle, qui ne dédaignait pas faire preuve de pragmatisme en oubliant parfois les grands principes)

Laval, qui brada la France aux nazisEnsuite… Effectivement, des salauds à l'état pur ont collaboré, tout comme de pauvres idiots séduits par le prestige d'un Maréchal de France (les seconds l'ayant en général payé bien plus cher que les premiers dès-lors que ceux-ci surent se faire oublier dans l'immédiat après-guerre).

Mais pourquoi se vautrer dans la délectation à salir son pays sans voir ce qui sauva son honneur? N'y eut-il pas de résistance, extérieure comme intérieure, pendant l'Occupation? Des militants tout comme des fonctionnaires qui "obéissaient aux ordres" ont certes contribué à la déportation des minorités haïes par le Reich, mais sans ces Français anonymes qui, ce faisant, couraient des risques hideux, la France aurait-elle sauvé en proportion, en Europe, le plus de Juifs, de Tsiganes et d'autres condamnés in fine par le système nazi, en proportion de leur population ? Et pourquoi Göring la vomissait-elle en permanence, appuyé par Sauckel, sous le prétexte qu'elle fournissait le moins de travailleurs eu égard à sa population et malgré les réquisitions, jamais assez de matières premières selon les vœux des nazis - si ce ne fut par le biais d'une résistance passive fort efficace ?

EisenhowerEst-ce un quelconque cocardier bien de chez nous qui évalua la contribution de la Résistance intérieure à une douzaine de divisions, permettant ainsi le succès du débarquement ? Non, il s'agit du commandant en chef d'Overlord, Eisenhower, qui cite le chiffre dans ses Mémoires écrites après le conflit, à un moment où rien ne poussait les Américains à encenser le gaullisme et son chef, perpétuel empêcheur de tourner en rond et de leur assurer la main mise totale et entière  des USA sur l'Occident.

artilleurs francais Bir HakeimC'est sans doute parce qu'ils ne se sont pas battus, que les FFI et les FFL ont conquis l'estime de leurs alliés et assuré à la France une place permanente au conseil de sécurité de l'ONU (Bir-Hakeim, résistance sans laquelle Rommel anéantissait les troupes anglo-saxonnes de Libye et d'Egypte ; chute de la ligne de front de Cassino qui permit la conquête de Rome ; soutien décisif aux Anglo-Américains dans le Maghreb ; débarquement de Provence ; éblouissante campagne d'Alsace et d'Allemagne… La liste est loin d'être exhaustive.

Goumiers en 1943, Italie

Ce sont eux qui permirent la prise de Monte Cassino, et la chute de Rome

Un des L'armée de 1939, fruit de la pensée décadente de la France réactionnaire de l'après 1920 fut certes écrasée, mais en perdant plus de 90.000 hommes en six semaines, massacrés sur les lignes de front ou sur des points d'appuis, dans le but de retarder de quelques heures un ennemi très supérieur - et une armée qui subit tant de pertes en six semaines, plus que lors des pires moments de la Grande Guerre, s'est battue avec héroïsme, contrairement à un truisme communément répandu.

Plus tard, FFL comme FFI, bien qu'en nombre réduit de par les circonstances, ont su redonner ses lettres de noblesse à la France combattante et un patriote (qui est tout sauf un nationaliste), au vu de ce qui précède, conchiera Giesbert et les types de son genre, qui bâtissent leur fond de commerce sur le mépris voire la haine de leur pays.

benjamin borghésio

qui nonobstant ce qui précède, apprécie Giesbert quand il s'aventure dans d'autres domaines. Son combat pour le respect de la condition animale, ses romans savoureux (ah! la cuisinière de Himmler!) sont tout ce qu'il y a de plus estimables.

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  • Républicain, tendance "gauche jacobine". Préoccupé par les questions socio-économiques, de même que par les questions d'environnement . Amoureux du Brésil et de la Guyane. Photographe, grand lecteur, fondu de vélo.
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