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Le blog de benjamin borghésio
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16 juillet 2015

L'Allemagne et sa "bonne conscience"

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Oskar Gröning comparaissait depuis le 21 avril au tribunal de Lunebourg, situé dans le nord de l’Allemagne. L’ancien comptable d’Auschwitz âgé de 94 ans, a été condamné, mercredi 15 juillet, à quatre ans de prison pour « complicité » dans le meurtre de 300 000 juifs.

La décision du tribunal est légèrement supérieure à la peine de trois ans et demi d’emprisonnement requise le 7 juillet par le parquet.  (Le Monde.fr)

 

 

Auschwitz+SortieKdoPathétique et cynique... Quand on connaît toute l'histoire. Ce type (qu'on ne traitera pas en victime, soyons clairs) était chargé de compter les devises saisies sur les innombrables morts dans les chambres à gaz d'Auschwitz.

Un scribouillard subalterne qui en plus, à trois reprises, a sollicité une mutation sur le front de l'Est - pas spécialement une colonie de vacances! - parce que son travail le dérangeait un peu quelque part. Mutation refusée à chaque fois, d'une part parce qu'il avait une vue relativement mauvaise, d'autre part parce que son intégrité était connue: contrairement à la plupart de ses collègues de la SS qui bossaient au camp, il ne s'en mettait pas plein les poches.

Oskar-Gröning-durante-el-Tercer-Reich-y-en-la-actualidad(ci contre... Gröning en 1944, en 2005) Ensuite, les bonnes âmes allemandes ont très récemment feint de découvrir cet affreux criminel contre l'humanité... alors que pour une série de documentaires produits par Arte il y a plus de dix ans, il s'était longuement exprimé et avait expliqué avec méthode le cheminement intellectuel qui, dans le contexte du moment, avait fait de ce très jeune homme un antisémite avéré puis un SS, qu'il avait reconnu tous ses actes, s'élevant en outre contre les délirants propos négationnistes sur "les chambres à gaz qui n'avaient pas existé". Si ajoutait-il, elles avaient bel et bien existé et elles tournaient à plein régime! A l'époque, aucune réaction de la justice allemande (alors que les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles)

Ce n'est que récemment qu'on a "découvert" ce vieillard cacochyme, qu'on l'a traîné devant les tribunaux, qu'on le condamne. Et à quelle peine! Quatre ans pour la complicité dans un assassinat d'une telle ampleur? Peut-on trivialement dire que c'est ou beaucoup trop si on estime malvenu de poursuivre un second couteau 70 ans après les faits, ou pas assez vu l'ampleur du crime qui ne peut se voir sanctionner que par la perpétuité - quitte à prononcer immédiatement après une grâce pour raison médicale et humanitaire vis à vis d'un nonagénaire en fin de vie, qui serait alors astreint à domicile?

ooskar-groning

Bundesarchiv_Bild_183-R65485,_Joachim_PeiperRappelons que l'Allemagne de l'ouest a très vite "recyclé" pas mal de ses nazis, de ses criminels. Il suffit, pour la plupart d'entre eux, de laisser passer l'orage de 1945. On citera Gehlen, très haut cadre du SD, adjoint de Heydrich, qui a contribué à former les services de renseignement de la RFA. Le général Lammerding, bourreau d'Oradour, paisiblement mort dans son lit, protégé par les gouvernements successifs de la RFA. L'infect Guderian qui servit Hitler jusqu'au bout et qui, parallèlement à son action militaire, dirigea le tribunal d'honneur (!!!) chargé de livrer à la gestapo les militaires soupçonnés d'appartenir de près ou de loin à la conjuration de juillet 1944 ce qui les menait nus sous une potence, pendus avec une corde à piano pour que l'agonie soit interminable (en collusion avec le très respectable junker von Rundstedt). Guderian contribua ensuite à fonder la Bundeswehr avec la bénédiction des nations de l'OTAN et mourut couvert d'honneurs. Peiper (ci-contre), criminel de guerre pendant la bataille des Ardennes (il fit massacrer des centaines de prisonniers désarmés), traité comme un héros dans son pays à sa libération très anticipée.

200px-Bundesarchiv_Bild_146-1973-012-43,_Erwin_RommelOn évoquera la création du "mythe Rommel" (ci-contre), soldat prétendument chevaleresque, honneur de l'Allemagne. Rommel fut un nazi inconditionnel jusqu'à ce qu'il apparut que la guerre était perdue (les rats quittent le navire). En 1943, pressé de toute part en Tunisie, alors que militairement il était très occupé, euphémisme, il mobilisa des milliers d'hommes pour regrouper avec zèle les dizaines de millers de juifs locaux, lesquels ne furent sauvés de l'extermination que par la capitulation anticipée de l'Afrika Korps...  mais la quasi canonisation du Sieur Rommel permit de donner à l'Allemagne massivement nazifiée un visage moins répugnant... et de favoriser ainsi sa réintégration dans le choeur des nations civilisées. La liste est loin d'être exhaustive.

Alors pourquoi exhumer un vieillard soixante-dix ans après les faits et plus de dix ans après son accès de franchise sur un média international? Tout simplement parce que l'Allemagne qui cette fois asservit l'Europe "proprement", avec l'arme économique, veut donner des gages "moraux". Cela contribuera, pense-t-elle, à faire oublier ses crimes abominables commis en Grèce, le fait qu'elle ne remboursa jamais sa dette après guerre (en particulier vis à vis de la Grèce)

z16650175Q,Oskar-GroeningPas question de plaindre Oskar Gröning. Dans le contexte de l'après guerre, il aurait gigoté sous une corde ou il aurait reçu ses douze balles, ou avec un peu plus de chance il aurait ramassé une lourde peine de réclusion que ça n'aurait en rien été scandaleux.

Mais exhumer de façon si théâtrale un nonagénaire cacochyme à des fins de communication politique, c'est un acte d'une médiocrité insigne qui ne trompera personne.

Surtout quand les survivants SS - y compris les criminels avérés -  peuvent toujours pavoiser librement à l'enterrement d'un d'entre eux,  quand on honore leurs morts au même titre que les pauvres types mobilisés sans enthousiasme (voir le cimetière de Bitburg, là où Reagan fit une visite amicale).

benjamin borghésio

 

 

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  • Républicain, tendance "gauche jacobine". Préoccupé par les questions socio-économiques, de même que par les questions d'environnement . Amoureux du Brésil et de la Guyane. Photographe, grand lecteur, fondu de vélo.
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