Le porc et les cantines.
______________________________.
L'hystérie anti musulmane – à bien distinguer de la légitime méfiance envers l'islamisme prosélyte et pire, celui qui appelle sous sa forme la plus extrême au Djihad – mène des hommes supposés d'Etat à commettre les pires saloperies en croyant combattre la xénophobie lepéniste sur son terrain, quand ils ne font que la légitimer puisqu'en employant ses arguments, ils leur donnent un caractère de respectabilité.
La dernière saillie en en ce sens consiste à prétendre priver de viande, certains jours, des gamins souvent défavorisés, dont le seul repas équilibré qu'ils peuvent consommer est celui de la cantine scolaire - et ce bien sûr au nom du "respect de la laïcité"
Entendons nous bien : la France est la mère de la laïcité d'état et il ne saurait être question de proposer de menus de substitution sur des bases religieuses dans les cantines des établissements publics : pas plus de hallal que de casher (en attendant sans doute les prescriptions des bouddhistes voire émanant de telle ou telle secte ou celles des végétaliens dont le choix personnel est respectable, mais dont la propension croissante à se poser en donneurs de leçons de morale et à vouloir imposer à tous leur choix de vie l'est beaucoup moins) De même on ne saurait tolérer que dans les hôpitaux on choisisse un médecin en fonction de son genre, que les horaires de piscine soient déterminés sur d'autres critères que l'établissement de créneaux réservés aux scolaires ou à des personnes bénéficiant d'une rééducation paramédicale (je pense en particulier à des obèses des deux sexes qui doivent bénéficier d'un accompagnement adapté et qui, en outre, pour des raisons de pudeur compréhensibles, souhaitent échapper aux moqueries ou à la curiosité malsaine)
Mais le fait de manger – ou pas – du porc dépasse de loin la prescription religieuse. Parce que l'interdit originel date de plus de cinq mille ans, et de ce fait, il est devenu une réticence non plus religieuse, mais culturelle. Des Musulmans d'origine (tout comme des Juifs), devenus agnostiques voire athées depuis des générations, s'abstiennent toujours de manger cette viande sans même savoir pourquoi : le réflexe culturel a remplacé la posture religieuse. Alors aboyer sur une catégorie que l'on discrimine (l'Arabo-Musulman à qui pour faire bonne figure on ajoute le Youpin... il reste toujours ce vieux fond d'antisémitisme qui empuantit notre pays), en s'en prenant à des enfants de surcroît, est parfaitement dégueulasse... parce que les adultes mangent chez eux ou au restaurant et choisissent de ce fait leur alimentation)
De plus en plus de restaurants scolaires ont choisi le mode "libre service". N'est-il pas possible, sans tapage, de laisser les enfants choisir autre chose quand du porc leur est proposé, sans jamais faire référence au tabou culturel ? (de toute façon, pour l'intégriste juif ou musulman, vous pourrez lui proposer du poulet, du veau ou du bœuf, s'il n'a pas été abattu selon les rites, ce sera toujours insuffisant et c'est à ce niveau qu'il faut placer le refus, nous sommes bien d'accord) Juppé, maire de Bordeaux et homme de droite depuis sa naissance ou peu s'en faut, a précisé que c'était le choix retenu sans sa ville, et que partisan d'une laïcité sans faille mais apaisée, il en serait toujours de même quelles que soient les vociférations de l'excité qui préside l'UMP en ce moment.
Dans les années 70-80, j'ai surveillé des cantines scolaires où on avait résolu le problème : le libre service étant inconcevable pour des raisons architecturales (vielles écoles construites sur un schéma traditionnel), la population enfantine ne mangeant pas de porc étant considérable (de 20 à 50% des rationnaires selon les écoles), le gestionnaire, pour ne pas discriminer les gamins en "tables avec porc" et "table sans porc" avait résolu le problème en... bannissant cette viande des cantines (au profit, entre autres, du poisson sous des formes les plus variées) : oui on peut (fort bien) manger équilibré en se passant de porc.
Que les élus islamophobes assumés ou hypocrites qui sautent comme des cabris en criant Laïcité ! Laïcité ! fournissent la preuve de leur sincérité en imposant, dans leurs cantines du personnel comme dans celles affectées aux enfants (scolaires ou de centres de loisirs) une choucroute garnie le jour du vendredi saint... On causera après, parce que des millions d'agnostiques ne fréquentant jamais les églises ou les temples, au nom de la coutume à bien distinguer de la foi s'abstiennent, ce jour là, de manger la moindre viande sans même se rappeler pourquoi.
Surtout quand ces élus devenus "laïcards" s'obstinent à installer des crèches de Noël dans leurs mairie – bâtiment républicain s'il en est, où chacun doit se sentir chez lui – (quel symbole religieux est plus fort que celui qui marque la naissance de Jésus?) Nous évoquons bien la "crèche", symbole totalement religieux, à distinguer du traditionnel sapin qui, lui, ne relève que de la coutume.
benjamin borghésio.
L'auteur de ce blog, après une longue absence causée par moultes raisons, tentera, c'est promis, de revenir à un rythme de parution raisonnable. Bonne lecture!