Economie pour les nuls (1) - le marché national.
En guise de préalable, on dira que si l'économie est une science, alors l'astrologie en est une également. Sinon, comment expliquer que les "grands économistes" qui glosent sur les ondes ou dans les journaux ne sont pas tous multimilliardaires?
L'économiste, c'est celui qui vous explique après pourquoi les choses se sont déroulées ainsi, il ne vous dit jamais avant ce qui se produira (ou s'il le fait, il se plante deux fois sur trois et se garde bien de se justifier de ses erreurs passées) Qui a prévu la dernière crise de 2008? Mais dès qu'elle a éclaté, ils furent des centaines à nous expliquer en quoi elle était inéluctable...
Aujourd'hui : pourquoi le salut de la vie économique et sociale* d'un pays ne dépend pas que de ses exportations? Pourquoi faut-il, sans dresser de Muraille de Chine, privilégier les marchés intérieurs?
* Comme nous sommes des humanistes, nous ne nous intéresserons à l'économie quà travers ce qu'elle peut apporter aux individus. Peu importe qu'un pays soit riche, si ses habitants sont pauvres.
Ce qui se conçoit bien, s'énonce clairement / et les mots pour le dire, arrivent aisément. Donc, pas de métalangage, mais des argumentations simples.
Prenons l'exemple d'un individu A qui vend 1.000 unités de compte (une monnaie quelconque, un objet en cas de troc, etc.) et qui achète pour 500 unités de compte.
Sur la même période, un individu B a vendu pour 800 unités de compte, et a acheté pour 200 unités de compte, préférant fabriquer par lui même une grande part de ce qu'il a besoin plutôt que l'acheter.
Sur cette période, A a gagné 1.000 - 500 = 500 UC ; B a gagné 800 - 200 = 600 UC.
B s'est davantage enrichi que A. Il en va exactement de même quand on considère les balances commerciales de tel ou tel pays. Avant de chercher à conquérir des parts de marché à l'extérieur - certes ça ne fait en général pas de mal -. commençons par satisfaire le mieux possible le marché intérieur (là quand on en récupère des pans, ça fait toujours beaucoup de bien)
Si les Allemands ont une balance commerciale florissante, c'est évidemment pour l'essentiel parce que leur économie, placée sur des secteurs où ils jouissent d'un monopole de fait (grosses berlines de luxe et machines outils, principalement) est performante. Le nier serait absurde... En outre ce monopole leur permet de supporter un euro fort (celui qui souhaite acheter le plus gros modèle de Mercédes n'est pas à 10 ou 15% près, sur son prix de vente. Idem, quand on a besoin d'équiper son usine avec des machines outils performantes qu'on ne trouve guère qu'en Allemagne, on n'a pas le choix... on casque).
A contrario, les pays européens qui ont un secteur productif orienté sur des produits moins hauts de gamme sont asphyxiés par l'euro fort, qui les rend non compétitifs par rapport à des pays émergents. Quant aux productions bas de gamme, elles sont en général condamnées à mort (quasiment impossible de confectionner des chemises en France avec un SMIC à mille euros net, quand au Bangladesh l'ouvrière est payés 40 euros par mois, sans aucune couverture ni protection sociale. NB. Ca n'empêchera pas le marque de vendre la dite chemise 50 euros pièce... Mettrait-on le SMIC à 200 euros mensuels que nous ne serions toujours pas compétitifs, surtout avec des salariés mourant de faim)
Mais, et nous en revenons à notre sujet après cette courte digression, si les Teutons sont si costauds, c'est aussi à cause (grâce?) à leur patriotisme économique.
Renault, Peugeot, Citroën, sont représentées là-bas à l'instar des marques locales, mais l'Allemand moyen ne concevra en général pas d'acheter une voiture étrangère, quand bien même il lui reconnaîtrait des qualtés équivalentes. Il y a donc pour Volkswagen un avantage naturel. Idem... En France on a le choix entre cinq ou six marques de prothèses auditives... En Allemagne alors que ces marques peuvent bien entendu s'implanter librement, dans la pratique, Siemens détient un monopole de fait (et pour être usager depuis 20 ans de ces appareils, je peux certifier que ce ne sont pas les meilleurs s'ils sont néanmoins de bonne qualité)
Alors sans "tentation albanaise" (fermeture totale des frontières qui serait d'ailleurs absurde, puisque nous devons acheter notre gaz, notre pétrole, nos minerais, que nous ne produisons ni café ni cacao, etc. et qu'il faut compenser en partie** par des ventes ces achats obligés) le réflexe "achetons français si c'est possible", loin de faire ricaner et de provoquer comme c'est le cas des réactions hostiles et ou ricanantes (on est de suite soupçonné de xénophobie) devrait être légitimé.
A supposer (c'est loin d'être démontré) que ce soit un peu plus cher, si ça permet de sauver des centaines de milliers d'emplois, non seulement les gens concernés y gagneront, mais le pays aussi y trouvera son compte (moins d'allocations chômage à verser, plus de cotisants, donc plus de facilités à mettre les comptes en ordre, moins d'impôts, de taxes, etc.)
** En partie, parce que "la balance commerciale est distincte de la balance des paiements, et chez nous si cette dernière n'est pas flamboyante elle est "moins pire" que la première
Objection... oui mais si on se replie sur nous mêmes, il y aura rétorsion. Le problème, c'est qu'il y a déjà rétorsion! Nous sommes en compétition avec des pays qui savent fort bien se protéger, soit carrément par des droits de douane (tout en vendant librement leurs produits chez nous) , soit de manière plus hypocrite, en instituant une bureaucratie tentaculaire qui freine toute tentative d'exportation chez eux, soit par la corruption endémique (il faut payer - cher - pour parvenir à vendre chez eux et en plus, désormais, on poursuit le "corrupteur"... bien plus souvent que les corrompus). Un pays qui sait très bien faire cela: la Chine. Le Brésil n'est pas mal non plus dans le genre.
Autre avantage à privilégier les circuits courts, à vendre d'abord à nos compatriotes avant de chercher des clients au diable vauvert: l'écologie! Se rend-on compte du prix que cela coûte en terme d'argent, de pollution et de gaspillage, que d'expédier des conteneurs à l'autre bout du monde? (même si les marins font désormais partie des travailleurs lesparmi les plus exploités au monde, pavillons de complaisance oblige)
Et la phase de prospection... Coûte-il plus cher d'organiser une campagne de promotion dans la région voisine, ou de rechercher un improbable marché aux antipodes? Ces délégations envoyées ici ou là à grands frais, forcément, ça se répercute sur les coûts et la concurrence internationale étant impitoyable, ça diminue le bénéfice.
Quand cesserons nous de nous tirer une balle dans le pied? La publicité pour le vin - produit français s'il en est - est de facto interdite, pour des raisons sanitaires (l'abus d'alcool est dangereux pour la santé). En foi de quoi, on trouve dans nos magazines des centaines de publicités pour les whiskys écossais, les bourbons américains, les vodkas russes et polonaises, etc. qui sont autorisées. Où est la logique?
A suivre: "dogme de la concurrence libre et non faussée", ou le foutage de gueule assuré.
benjamin borghésio
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