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5 mars 2014

Fraude fiscale: "nets progrès mais peut mieux faire"

Selon le quotidien le Monde, le nombre de signalements reçus par Tracfin en 2013 est de 28.238, en augmentation de 6% par rapport à l'an passé, mais surtout, il est deux fois plus élevé qu'en 2008.

 

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De quoi s'agit-il? TRACFIN (Traitement du Renseignement et Action contre les Circuits FINanciers clandestins)  est un organisme du Ministère de l'Économie et des Finances chargé de la lutte contre le blanchiment d'argent. Créé en 1990, Tracfin  acquit une direction propre en 2006, devenant un service à compétence nationale.
Ce service d'enquête administrative est saisi sur la déclaration de soupçon d'un organisme financier soumis au dispositif anti-blanchiment (banques, administrations, etc.). Il agit par échange d'informations avec les administrations de l'État, notamment l'Office central de répression de la grande délinquance financière, l'Autorité de contrôle prudentiel, l'autorité des marchés financiers ou avec les collectivités territoriales ; il exerce également un droit de communication auprès de tous les organismes assujettis. Au terme de son enquête, une présomption de soupçon peut être transmise à la justice. Ces déclarations de soupçon se font désormais avec une grande souplesse.

 

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Concrètement en 2013, 57 % des dossiers avait un enjeu estimé par Tracfin entre 100.000 euros et un million d'euros. 20 % sont supérieurs à un million et 10 % inférieur à 100.000. On notera que les signalements TRACFIN ne servent pas seulement au fisc: ils ont permis de détecter un certain nombre de cas d'abus de faiblesse. Un bilan plus détaillé des actions de la cellule est promis pour avril. Pierre Moscovici a annoncé que 10 agents supplémentaires allaient rejoindre la cellule, portant l'ensemble des effectifs à une centaine, afin "d' accompagner la montée en puissance de Tracfin". La cellule bénéficiera également d'une augmentation de 30 % de la superficie de ses locaux et surtout, d'une vaste rénovation de son outil informatique.

6U495B0N_tracfin-630_1TRACFIN a démontré son efficacité croissante en amont, mais il reste des progrès à accomplir. Tout d'abord, renforcer les sanctions vis à vis des organismes tenus de signaler des mouvements de fonds suspects et qui ne le font pas, ou pas suffisamment. Ils ne sont encore pas suffisamment rares, ces comptes bancaires appartenant à des sujets dont les revenus déclarés sont minimes voire nuls, mais qui sont fréquemment abondés par des versement en espèces d'un montant considérable, des virements venant de l'étranger insuffisamment motivés, etc.

Lorsque TRACFIN est saisi d'une de ces informations (ou lorsque ses propres services détectent des mouvements suspects: désormais l'organisme a accès aux comptes bancaires et aux informations émanant des organismes sociaux), il peut affiner l'enquête, signaler le cas suspect aux services concernés (douanes, répression des fraudes, fisc, etc) qui sont à même de procéder aux vérifications et aux redressements assortis d'amendes et de pénalités diverses. On regrettera cette disposition particulière qui permet que la présomption ne soupçon ne soit transmise à la justice qu'avec l'aval de Bercy... c'est à dire du pouvoir politique: de même que tout financier est obligé de transmettre des mouvements suspects, TRACFIN, après vérification de la matérialité des ilégalités devrait être tenue de transmettre les faits à la justice.

Il n'empêche... Ne boudons pas notre plaisir devant les progrès accomplis dans la lutte contre la fraude fiscale, et ce malgré le refus veule de la politique de l'amnistie contre un retour des capitaux à peine taxés, choisie par des pays voisins. Plus on en donne au fraudeur et plus il en veut, donc on ne fera pas appel à ses bons sentiments: il convient de le terroriser.

Outre les signalements de TRACFIN, en nombre croissant, on notera l'efficacité accrue des contrôles fiscaux initiée par Bercy

article_woerthFinie, la cellule "VIP" qui fonctionna d'avril à décembre 2009 au temps d'Eric Woerth : 4 725 bénéficiaires qui bénéficièrent de l'anonymat et de l'application de faibles taux de pénalités. En outre les fonctionnaires de cette cellule rendaient des comptes au Ministre, également trésorier du parti au pouvoir, qui était allée en personne, en Suisse, quêter pour financer la campagne de Sarkozy! On ne peut que froncer le nez devant ce fâcheux mélange des genres, pour demeurer dans la litote.

Le gouvernement annonce qu'il procédera différemment. Les régularisations seront traitées par la Direction nationale de vérification des situations fiscales (DNSVF), qui s'occupe des particuliers à hauts revenus et patrimoine important, ce qui peut choquer: d'ailleurs les avocats ont toujours réclamé un traitement délocalisé pour leurs clients sont soulagés : le petit patron de PME qui doit rendre des comptes choisit-il son inspecteur?

Mais on nous promet qu'il n'y aura pas d'anonymat et que la "modulation" (traduction: la baisse) des sanctions sera appliquée dans la transparence, à condition que les fraudeurs se signalent à l'administration avant d'être repérés.

La fraude fiscale des particuliers est sanctionnée de plusieurs façons : intérêts de retard (4,80 % du montant de l'impôt dû par an) pendant sept ans (les cas antérieurs au 1er janvier 2007 étant couverts par la prescription) ; majoration de 40 % pour manquement délibéré au paiement desimpôts ; pénalités pour manquement formel à l'obligation de déclaration des comptes. Cette amende forfaitaire, fixée à 1 500 euros par an et par compte non déclaré, peut être majorée jusqu'à 10.000 euros par an en cas de détention d'un compte non déclaré dans un pays avec lequel la France n'a pas signé d'accord d'entraide fiscale. En outre, pour les comptes non déclarés d'au moins 50 000 euros, l'amende est de 5 % du solde créditeur par an.

Rien qu'avec la traque des évadés fiscaux, Bercy espère récupérer cette année plus de 2.5 milliards d'euros supplémentaires.

Rapprocher le citoyen de la lutte contre la fraude. Comment faire?

Trop souvent, et des politiciens de droite tirent sur cette ficelle, on assiste à des vociférations poujadistes contre "l'excès de contrôles" (par les mêmes qui exigent le principe de précaution absolu pour ce qui est dans leurs assiettes, qui vitupèrent contre les déficits et les nouveaux impôts). Pourquoi a contrario des idées reçues, ne pas donner encore plus de moyens aux contrôleurs (par exemple, un numéro de contribuable à renseigner pour tout achat conséquent ou toute transaction financière importants, ce qui faciliterait les croisements entre des revenus sous les minimas sociaux ou peu s'en faut, et des achats somptuaires) et en échange, faire un bilan annuel des sommes récupérées sur les fraudeurs, et affecter une part substantielle des amendes et pénalités recueillies au contribuable (par le versement d'un impôt négatif) Le citoyen qui verrait sur sa feuille d'impôts la transcription en clair de ce qu'on gagne en traquant les fraudeurs changerait sans doute d'attitude à leur égard. Et ça ne serait pas plus immoral que de continuer de rémunérer des "aviseurs", dénonciateurs payés à la commission pour les bonnes affaires qu'ils font faire aux douanes ou au fisc.

benjamin borghésio

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  • Républicain, tendance "gauche jacobine". Préoccupé par les questions socio-économiques, de même que par les questions d'environnement . Amoureux du Brésil et de la Guyane. Photographe, grand lecteur, fondu de vélo.
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